COMMENT ELLE VEUT S'EN SORTIR !

L'ACADIEN - Le 16 juin 1922, page 1

L'Évangéline dans son dernier numéro, invoque le prétexte que nous lui avons fait dire bien des choses qu'elle n'avait pas dites au sujet de son article du 8 courant " Autour d'une brochure ". C'est son seul point d'appui pour sortir de l'impasse dans lequel elle vient une nouvelle fois de se plonger. Mieux que cela, notre confrère n'aurait rien dit du tout si ce n'est cette affirmation qu'il s'empresse de répéter : " Nous (les Acadiens) semblons approuver publiquement et officiellement une thèse qu'individuellement nombre de nos intellectuels rejettent, une thèse surtout que nous n'avons pas la compétence voulue pour juger définitivement… " " Entre cela et ce que nous fait dire notre confrère, ajoute L'Évangéline, il y a une marge ! "

L'Évangéline nous reproche d'avoir pris deux colonnes pour signaler les bévues qui occupaient à peu près le même espace dans son numéro du 8 juin, et candidement, elle nous arrive avec l'affirmation que ce qu'elle avait voulu dire s'exprimait par une simple petite phrase de quatre lignes que nous citons plus haut.

De l'aveu même de notre confrère, il " a pris un soin particulier pour expliquer ce qui nous intéressait dans le moment ", à savoir " l'attitude prise par les Acadiens dans le débat ". Cette attitude, dit-il, c'est au congrès de la Pointe-de-l'Église que les Acadiens l'ont prise, en décidant que la Société Nationale l'Assomption achète et publie le travail de M. Gaudet. Voyons maintenant comment il s'explique.

" Quelques temps après, écrit notre confrère, le Comité de l'Église-Souvenir, s'autorisant de la résolution adoptée au Congrès, achète le manuscrit en question, le fait imprimer, et, à grand renfort de réclames, tâche de l'introduire dans tous les foyers acadiens ". Plus loin, il ajoute : " Le travail de M. Gaudet est une dissertation.. qui porte sur un seul point de notre histoire. De par sa nature même, ce ne sera jamais un livre populaire ", etc. … Et ces prémisses étant énoncées, L'Évangéline en conclu que " l'Acadie s'est placé dans une situation fausse, que nous avons agi avec une légèreté déconcertante "m etc., tout en laissant la porte ouverte à une tout autre conclusion. Cette conclusion c'est celle-là même que notre confrère impose dans un autre petit argument inséré en guise d'explication entre les prémisses du premier. " Si encore ", dit-il, " le livre de M. Gaudet était un simple récit, une espèce d'histoire populaire du Grand Dérangement dans laquelle seraient glissées ces théories. Oh alors, nous aurions une excuse facile et tout à fait plausible. Nous pourrions dire : " nous voulons que les Acadiens lisent et connaissent leur histoire. Nous voulons que chaque foyer ait son manuel d'histoire d'Acadie. " Or, ajoute-t-il, le travail de M. Gaudet n'est pas cela. Donc, concluons-nous d'après les règles les plus élémentaires du syllogisme : Nous ne pouvons pas dire : Nous voulons que chaque foyer aie le livre de M. Gaudet. Et de fait, L'Évangéline s'est héroïquement abstenue de dire ce qu'elle semble tenir à ne pas vouloir dire aux autres.

Nous avons demandé à notre confrère pourquoi il avait attendu si longtemps pour protester contre une attitude, laquelle de son propre aveu, est fausse et qui a été prise lors du Congrès de la Pointe-de-l'Église. Notre confrère a eu recours à sa tactique favorite et essaie d'éviter la question en faisant une petite digression sur la propriété des termes.

Nous lui avons offert une excellente occasion d'exprimer pour une fois au moins, toute sa bienveillance vis-à-vis le projet de l'Église-Souvenir. Il nous répond avec sa candeur habituelle, " qu'il n'en a jamais soufflé mot ". Et cependant, il prend l'attitude singulière de reprocher à toute l'Acadie d'avoir encouragé la diffusion d'un livre que l'on vend au profit de L'Église-Souvenir. Encore une fois, nous voudrions faire remarquer à notre confrère que tous ses lecteurs sont anxieux de connaître ses sentiments à l'égard de cette œuvre nationale, et qu'il est peu généreux de sa part de ne pas les satisfaire sous ce rapport. S'il refuse aux lecteurs cette satisfaction bien légitime, il nous semble, il restera toujours un doute sur le motif qui a suscité l'article " Autour d'une Brochure ".

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